Dans le monde d’aujourd’hui, la diversité, l’équité et l’inclusion (DEI) forment une composante essentielle de la santé organisationnelle au point d’en être le synonyme. C’est en partie attribuable aux tendances sociales qui poussent les organisations à faire preuve d’écoute et d’empathie à l’endroit d’un plus grand nombre de parties prenantes dont les intérêts sont en jeu – qu’il s’agisse d’investisseurs, de clients, d’employés, de fournisseurs, des communautés ou des gouvernements.

 

À l’aune de cette norme, comment se porte la santé des entreprises dans la foulée de la pandémie? La perturbation de l’économie de l’expérience attribuable à la demande renouvelée pour les biens à l’ère de la COVID-19 a nui aux femmes, qui occupent la majorité des emplois du secteur tertiaire. De plus, nous savons que ce sont souvent à elles qu’incombent les responsabilités accrues en matière de soins. Selon l’Enquête 2022 de Mercer sur les tendances mondiales en talents, 44 % des entreprises affirment que le télétravail a poussé les femmes à quitter le marché du travail. Pourquoi? Les heures de travail supplémentaires pourraient être en cause. Moins de femmes (40 %) que d’hommes (52 %) indiquent avoir tiré profit d’heures de travail écourtées grâce au télétravail.

 

Pour accomplir de véritables progrès durables vers l’équité entre les genres, nous ne pouvons pas nous permettre de fermer les yeux sur les leçons tirées de la pandémie. Au contraire, il est impératif de prendre un pas de recul pour que la relance mène à un meilleur équilibre entre les genres.

 

  1. Parmi les répondants, les personnes qui s’identifient comme femmes ressentent moins d’énergie que leurs collègues masculins et sont moins susceptibles de se dire épanouies.  Les divergences de niveaux d’énergie peuvent s’expliquer par les sources d’épuisement professionnel. Selon les répondantes, l’épuisement est attribuable au surmenage (charge mentale liée à la pandémie) et à la charge de travail. Pour les répondants qui s’identifient comme hommes, c’est plutôt dû à un manque d’équité (perception de leur traitement par rapport à celui de leurs pairs) et de communauté. Dans le sillon de la pandémie, les hommes sont plus susceptibles d’exprimer le souhait de consacrer davantage de temps au travail (ce qui pourrait être attribuable à leur disponibilité accrue, tandis que les femmes indiquent avoir travaillé de plus longues heures). Les perceptions au sujet du contrôle sont également susceptibles d’entrer en ligne de compte. Les femmes se sentent légèrement moins habilitées à prendre autant de congés qu’elles veulent, tant que leurs objectifs sont atteints (73 % contre 63 %).
  2. Différences de perception au sujet du soutien. Les conclusions de l’étude en ce qui a trait à la perception qu’ont les travailleurs de leur épanouissement révèlent que les hommes ont une meilleure impression de leur milieu de travail : ils se sentent plus soutenus quant au renouvellement de leurs compétences, croient que leur gestionnaire a leur succès professionnel à cœur et estiment que leur culture du travail est saine. Les hommes sont également plus susceptibles d’avoir une vision positive de leurs perspectives de carrière (p. ex., ils sont confiants quant à leur sécurité financière, sont certains que leurs compétences peuvent s’appliquer à d’autres postes et font davantage confiance à leur entreprise pour leur offrir un emploi si leur poste actuel devait être éliminé).
  3. Les hommes et les femmes conçoivent le travail flexible différemment. Les hommes sont plus susceptibles d’être en faveur du retour au bureau que les femmes (55 % contre 48 %) et une plus grande proportion d’entre eux croient que le travail s’effectue dans un bureau (67 % contre 53 % des femmes). Remarquablement, les craintes des hommes au sujet du télétravail et de l’avenir du travail dépassent celles des femmes. Les hommes sont nettement plus susceptibles d’exprimer des préoccupations au sujet de gestionnaires forçant les télétravailleurs à passer au travail à la demande (70 % contre 59 %), de l’effet nocif du télétravail sur les interactions sociales (72 % contre 62 %) et de la perte de contact avec la culture d’entreprise (67 % contre 57 %). La différence entre les genres se répercute sur la manière dont les hommes et les femmes au sein de la haute direction conçoivent l’avenir du travail. Les différences sur le plan de l’attitude face au retour au bureau sont plus marquées au haut de la hiérarchie, le tiers des dirigeants masculins étant fondamentalement convaincus que le travail s’effectue dans un bureau (contre moins du tiers des dirigeantes). Deux tiers des femmes gestionnaires craignent que les meilleurs talents ne reviennent pas travailler en personne, un sentiment qu’à peine plus de la moitié de leurs homologues masculins partagent.
  4. Les visions des dirigeants au sujet de l’avenir du travail et des indicateurs importants divergent selon le genre. Questionnées au sujet des pratiques cruciales pour leurs priorités en matière de gestion du personnel en 2022, les femmes membres de la haute direction placent l’essor de la DEI chez les employés au premier rang, alors que les hommes aux fonctions analogues indiquent que les occasions de renouvellement des compétences sont primordiales. Il n’est donc pas surprenant que les femmes gestionnaires soient plus susceptibles d’avoir mis en branle le recrutement au sein de bassins de talents d’autres régions afin de pourvoir des postes intégralement en télétravail que leurs homologues masculins (42 % contre 35 %) et d’être passées à la semaine de travail de quatre jours (34 % contre 27 %). Bien que tous reconnaissent l’importance cruciale que revêtent les avantages sociaux et le mieux-être cette année, les femmes sont plus susceptibles d’avoir la santé et le mieux-être sur leur tableau de bord, tandis que les gestionnaires masculins mettent plutôt l’accent sur la productivité et le coût total de la main-d’œuvre.
  5. Les visions des dirigeants au sujet de l’avenir du travail et des indicateurs importants divergent selon le genre. Les hommes membres de la haute direction sont moins nombreux que leurs homologues féminines à estimer qu’ils n’ont pas accompli de grands progrès pour mettre sur pied un milieu de travail diversifié, équitable et inclusif (27 % contre 34 %) – une statistique qui laisse songeur. Il est donc étonnant de constater qu’ils sont par ailleurs moins susceptibles d’ajouter un chef de la diversité et/ou de l’inclusion à leur organisation que ne le sont les femmes occupant un poste de direction. De plus, seulement deux hommes dirigeants sur cinq prévoient investir afin de déceler les systèmes d’évaluation discriminatoires et les biais algorithmiques en 2022, contre la moitié des dirigeantes. Compte tenu des nouvelles exigences de divulgation et du resserrement de la législation en matière de protection de la vie privée, il s’agit d’un raté.

La bonne nouvelle est que tous les dirigeants, peu importe le genre, font de la DEI une priorité cette année. Pour que celle-ci se traduise en résultats, les gestionnaires devraient envisager ce qui suit :

 

  • Analyser les politiques de retour au bureau en tenant compte des genres, particulièrement sur le plan émotif. Aux yeux des femmes, un sentiment de sécurité face à l’avenir (éducation financière, gestion du temps) est primordial. Pour les hommes qui travaillent à distance, ce sont les occasions de réseautage qui seront cruciales.
  • Éviter que des biais inconscients viennent déterminer les occasions en raison des politiques de retour au bureau sur une base volontaire. Lorsque le choix est laissé à la préférence de chacun, la tendance veut que les hommes plus âgés retournent au bureau alors que les femmes, surtout celles qui sont plus jeunes ou issues de la diversité, restent à la maison. Si aucune mesure n’est adoptée pour contrecarrer les préjugés associés au présentéisme, ces disparités pourraient se traduire en distribution inéquitable des occasions.
  • Aider les femmes à demeurer des atouts sur le marché du travail. Les hommes conçoivent l’avenir du travail en fonction de la technologie et du renouvellement des compétences, alors que les femmes recherchent l’équilibre. Encore ici, si les femmes sont dépourvues de moyens de s’épanouir, le fossé entre les genres sur le plan des occasions, de la rémunération et des rentes pourrait se creuser davantage.
  • Soutenir la diversité des genres au sein de toutes les équipes dotées d’un pouvoir décisionnel, et non seulement des conseils d’administration. Il ne fait aucun doute que les femmes qui occupent des postes de direction font des choix différents de ceux de leurs homologues masculins. La diversité sur le plan de la race, du genre, des origines et de l’âge est cruciale pour prendre des décisions éclairées, qu’il s’agisse de bâtir un portefeuille de placements, de parier sur une stratégie ou de promouvoir de bonnes pratiques de travail. En tenant compte des facteurs qui favorisent une meilleure diversité au niveau de la direction et en ayant recours aux outils qui engendrent des équipes diversifiées où les femmes occupent une place paritaire, nous voyons à ce que les écarts ne se creusent pas.

Pour combler le fossé entre les genres, il faut que l’ensemble des parties prenantes gardent l’œil ouvert, demeurent à l’affût et, lorsque les progrès stagnent, fassent entendre leur voix pour soutenir la cause. En 2022, nous nous attendons à ce que les organisations étoffent leurs engagements en la matière (notamment ceux souscrits dans le cadre du projet Good Work Alliance) et se fixent des objectifs sur le plan de la diversité de leur personnel, de leurs gestionnaires et, dans certains cas, des partenaires au fil de leur chaîne d’approvisionnement. Il faut espérer que ces indicateurs de capital humain imprégneront les plans d’affaires et les rapports cette année.

 

Mon souhait est que tous ceux qui liront ce texte se fixent leurs propres objectifs afin de contribuer au progrès. Nous ne parviendrons pas à relever les défis propres à notre époque – la Grande Démission, la pénurie de main-d’œuvre qualifiée et de travailleurs de première ligne et les coûts sociaux et de santé en hausse – sans remédier aux difficultés concrètes auxquelles les femmes sont confrontées. Les défis liés à la responsabilité des soins, les stéréotypes, l’iniquité salariale et les écarts sur le plan des rentes ne constituent que quelques-uns des obstacles qui se dressent sur la route vers la parité hommes-femmes.

 

Nous devons agir de concert pour bâtir des milieux de travail inclusifs, élaborer des pratiques de gestion des talents pérennes et instaurer un climat de sécurité psychologique où les approches et les compétences distinctes des femmes sont reconnues à leur juste valeur. Cela exigera de la souplesse par rapport à l’endroit et au moment où le travail s’accomplit, de sorte que les femmes puissent saisir des occasions plus tôt dans leurs carrières, notamment celles qui se trouvent en périphérie de notre secteur. J’espère que ceux qui sont en mesure d’influencer la trajectoire de carrière des femmes n’hésiteront pas à s’attaquer à cet enjeu alors qu’ils planifient l’avenir du travail.

Kate Bravery
Kate Bravery
Responsable des Solutions-conseils et perspectives mondiales chez Mercer

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